Le yoga en périnatalité: Le yoga et la préparation anténatale

La capacité d’une femme à vivre sa grossesse, à intégrer toutes les modifications corporelles et psychologiques qu’elle traverse, dépend largement de sa capacité à s’adapter
à ces changements, mais aussi à son besoin ou non de solliciter une des nombreuses aides que nous pouvons raisonnablement et humblement lui proposer.

Je fais référence entre autres à l’haptonomie, l’accompagnement psycho-corporel, le yoga,
la sophrologie, la relaxation, etc…
Il faut également ne pas perdre de vue qu’en tant que praticien de la périnatalité, nous sommes censés transmettre et appliquer ce que nous avons nous-mêmes réalisé au cours de nos formations et de nos vécus.

Présentation

Je pratique le yoga depuis 25 ans, je l’enseigne depuis 15 ans et j’ai mis en place des cours spécifiques pour les femmes enceintes depuis 10 ans.
J’anime également des formations auprès des sages-femmes.
Enfin, en tant que professeur de yoga, je suis membre d’associations autour de la naissance.

Introduction de ma pratique

Attendre un enfant est un moment d’exception qui se déroule dans un climat d’une haute intensité. Celui-ci se mesure à l’hypersensibilité de la femme enceinte.
Chacun sait qu’une femme enceinte a besoin de doses supplémentaires d’empathie,
de prise en charge et d’accompagnement, de patience et d’écoute.

Je me propose pour vous parler de ma pratique et de ce que j’ai mis en place pour apporter une réponse possible aux différents besoins de la femme enceinte.
Je débuterai en exposant le plan des différentes parties que je vais aborder :
A : Le yoga comme technique corporelle

B : Le yoga dans le lien mère-enfant
C : Ma pratique et le déroulement d’une séance
D : Mon travail avec l’équipe médicale : gynécologues-obstétriciens, sages-femmes, psychologues.

Le yoga est plus célèbre que connu.

Cette pratique, qui est la source de toutes les gymnastiques actuelles, nous permet de travailler le corps et l’esprit conjointement. Il existe plusieurs sortes de yoga, mais je me suis attachée au yoga en tant que technique du corps tout au long de la grossesse, adaptée à notre mode de vie occidental d’aujourd’hui et à nos morphologies.

Le yoga en Inde est une pratique quotidienne. Différents rituels accompagnent la femme tout au long de la grossesse, avec pour objectif de placer la mère dans un environnement positif pour elle et son enfant, afin que celui-ci se développe le mieux possible.
Dans ces rituels, on trouve des postures, des respirations de yoga ainsi que des massages

qui se poursuivront avec le bébé de façon quotidienne.
De la même façon, avant, pendant et après l’accouchement, on pratique des massages du périnée avec des huiles qui permettent d’améliorer l’élasticité des tissus. Cela peut faciliter le passage
du bébé lors de l’accouchement et permet par la suite une meilleure récupération périnéale.

J’ai utilisé une partie des techniques du yoga pour élaborer ma pratique. Je me propose à travers celle-ci de trouver quelques réponses aux besoins intenses de la femme enceinte :

– selon le mode de vie : les carriéristes, les libérales, les femmes qui évoluent dans des milieux d’hommes, les femmes qui ont de longs temps de transport…
– mais entrent aussi en jeu leurs fatigues, les changements de leur corps, leur morphologie, leur épuisement imprévisible (travail par exemple, comme de nombreuses femmes,

face à leur ordinateur)
– celles dont le métier implique qu’elles soient debout (problèmes de circulation…) … mais aussi un changement de caractère lié à leur hyper sensibilité.

J’ai donc mis en place de petits groupes de 4/5 femmes (au même stade de grossesse) qui se retrouvent une fois par semaine à partir du 7e mois jusqu’à l’accouchement, sachant qu’avant 7 mois, elles peuvent intégrer des cours de yoga. Après l’accouchement, la plupart d’entre elles reviennent ensuite avec leur bébé.

Je vais vous expliquer ce que je propose lors de mes cours :

Tout d’abord, je commence en interrogeant les femmes et je leur demande quel genre de sensations engendre chez elles la grossesse.
Selon ce qu’elles expriment, leurs manières de sentir l’enfant qu’elles portent, leur humeur, leur sen- sibilité du moment, j’adapte mes exercices à chacune d’entre elles.

En général, je privilégie dans ces exercices certaines régions du corps comme les épaules,
la région lombaire, le bassin, le périnée, les jambes, qui sont mises en jeu de façon importante pendant la grossesse. J’attache bien entendu une importance particulière à la respiration.

Voici le déroulement d’une séance type :

Il y a toujours une première préoccupation, c’est celle qui concerne leur image, l’image du corps
qui se modifie, le bébé qui prend de la place, bouge, mais aussi les divers changements de position qui veulent entraîner des douleurs lombaires et des contractions utérines.
Pour commencer, je propose souvent des étirements du haut du corps, car elles sont parfois vite es- soufflées, souvent tendues au niveau des épaules, de la nuque…
Et des mouvements simples avec les bras peuvent permettre de dégager la cage thoracique
par rapport à la position du bébé, de relâcher les tensions au niveau du haut du dos.
Car c’est souvent de cette douleur dont se plaignent les femmes, notamment celles qui travaillent beaucoup et jusqu’à la fin de leur grossesse.
Une femme sur deux, quand elle arrive à mon cours, ne sait pas basculer le bassin sans mettre
de tension au niveau du ventre ou sans accentuer sa cambrure. Souvent même elles sollicitent leurs abdominaux.
Selon leur morphologie, la position du bébé, je leur propose des exercices spécifiques.
Dans tous mes cours, je travaille activement la bascule du bassin, parce que les femmes naturellement cambrées souffrent souvent du dos, le bébé accentuant leur cambrure.
Elles apprennent ainsi à ménager leur région lombaire, à alléger les tensions en contrôlant
la bascule du bassin.
2 femmes sur 3 ont appris à respirer avec le ventre. En le poussant en avant sur l’inspiration,
elles accentuent d’ailleurs leur cambrure (alors que ce n’est pas le ventre qui se remplit d’air
mais les poumons !).
Je leur réapprends donc à respirer avec les poumons et non le ventre.
La respiration accompagne les étirements.
Lorsque les femmes ressentent des douleurs dans le bas du ventre ou dans le dos lorsqu’elles changent de position, elles ont tendance, comme nous tous, à bloquer la respiration,
ce qui a pour effet d’accentuer la douleur.
Je leur fais prendre conscience de ce mécanisme et les engage à avoir comme 1er réflexe d’expirer

ou de soupirer puis de se laisser inspirer (mimer) pour peut-être diminuer la douleur.
Ainsi la future maman respire pour elle et son bébé.
Il arrive que lors de ce travail corporel, on soit confronté à des choses beaucoup plus profondes qui travaillent inconsciemment chacune d’entre nous et qui refont surface à cette occasion.

1 FEMME SUR 10 seulement sait ce qu’est le périnée (l’année dernière, une femme
le confondait avec le péroné…).
Les femmes apprennent à situer le périnée, à savoir le dissocier des muscles fessiers,
à savoir le contracter afin de pouvoir le relâcher, et effectuer ce travail sur une expiration plutôt que de bloquer la respiration.

Le yoga en préparation anténatale, tel que je le pratique, c’est non seulement un travail corporel, physique (comme je viens de vous l’expliquer) mais aussi un moment de rencontre et de détente.

Dans ces séances pour femmes enceintes, il se dit beaucoup de choses.
Les femmes ne se sentent plus seules face à leurs inquiétudes, cela leur permet de parler de leur changement physique et psychologique, de leurs peurs : peur de l’épisiotomie,
de la césarienne, du bébé en siège…
mais aussi des éléments de leur histoire qui leur sont tout à fait personnels.
Les femmes expriment le besoin de se détendre et je propose pour cela un moment adapté au groupe mais aussi à leurs envies. Une respiration peut être relaxante…

Après un temps de détente, souvent, les femmes plus calmes, confiantes, expriment également
leur peur de la douleur, de la péridurale, de la durée de l’accouchement, du départ à 2 à la maternité et du retour à 3.
Le fait d’avoir mis en place des petits groupes permet que ce soit un lieu où la parole circule, un espace-temps non médical et une disponibilité.
Nous sommes tous et toutes en permanence détenteurs d’histoires et de secrets de famille,
et nous savons à quel point les choses peuvent se répéter d’une génération à l’autre.
Nous savons également que nous pouvons peut-être permettre que cela s’arrête un jour.
De mon point de vue, le yoga que je propose, ce travail corporel associé à l’accompagnement verbal, va dans le sens de faciliter le lien entre la mère et l’enfant, dans l’espace d’une véritable cohabitation.

Vivre et élargir cet espace de cohabitation, sans oublier la présence inestimable et souhaitée du père que j’invite à venir participer aux séances.

Je reste en contact avec l’équipe qui m’adresse la femme. Si c’est nécessaire, je m’adresse à un psychologue de l’équipe ou à l’extérieur.
J’encourage toujours les femmes à poser toutes les questions qui peuvent les rassurer et à prendre possession de leur propre accouchement.

Pour compléter ce travail, je participe régulièrement à des formations auprès des sages-femmes.

CONCLUSION

A tous les instants, il est nécessaire de soutenir le contact avec l’équipe médicale.
Et au-delà des différentes techniques existantes offertes aux futures mamans, il me semble important de retenir que c’est réellement un travail individualisé.
Chaque grossesse est unique et émouvante.
Je vous remercie d’avoir prêté attention à l’exposé de ma pratique.

Virginie Boé, Janvier 2002